De sudouest.fr
Forte mobilisation, dont celle de Michel Drucker, autour d'Émilienne et Raymond Espiot, qui risquent de se voir enlever la chevrette qu'ils ont adoptéeÉmilienne Espiot est la seule à pouvoir toucher Bambi, qui semble plutôt apprécier. (photo M. Y./« SO »)
«Bonjour, c'est Michel Drucker. Je vous appelle au sujet de Bambi. » On aurait pu croire à une blague, mais pas du tout. Hier, le présentateur-star a bien appelé la rédaction de « Sud Ouest » à La Rochelle pour rejoindre le mouvement de solidarité en faveur d'Émilienne et Raymond Espiot.
Dans cette maison de Mirambeau, le téléphone n'arrête plus de sonner. Révélée dans nos colonnes, l'histoire de ce couple, qui risque de se voir enlever par l'administration la chevrette qu'ils élèvent depuis plus d'un an et demi, fait le buzz.
Son tapis dans le salon
Émilienne et Raymond Espiot, agriculteurs à la retraite, ont recueilli cette chevrette au printemps 2010, alors qu'elle n'avait que quelques jours. Raymond l'a trouvée dans un piège à renard. En voulant la libérer, il a commis une erreur et l'a touchée. Sa mère l'a donc rejetée. « Alors on s'est dit : "On la garde, on ne va pas la laisser mourir" », se rappelle Émilienne.
Très vite, l'animal prend ses marques et s'adapte à la vie de la famille. Comme un chien, elle a son tapis dans le salon, sa gamelle remplie de pommes de terre, de biscottes, de glands. « Elle adore la soupe de tomate aux vermicelles », raconte même Émilienne. La journée, Bambi gambade dans la cour fermée, avec les poules et les lapins. Un grelot autour du cou, on l'entend venir de loin.
Mais posséder un animal sauvage est interdit, sauf sous certaines conditions très précises. La DDTM, Direction départementale des territoires et de la mer, leur a donc demandé de la confier à un refuge avant le 31 décembre.
Les Espiot ne découvrent pas la loi. Au début de l'été, Émilienne et Raymond ont même décidé de se mettre en règle. Ils sont alors convaincus qu'il ne s'agira que d'une formalité, compte tenu de la complicité établie avec l'animal. Les premiers contacts avec les autorités sont plutôt bons. Mais, le 28 octobre, la décision tombe : ils ne remplissent pas les conditions pour garder un animal considéré comme dangereux.
Droit de visite
« Pour détenir un chevreuil, il faut un diplôme ou une expérience d'éleveur de ce type d'animal », explique Yann Fontaine, de la DDTM. Il faut également remplir certaines conditions sanitaires, comme la surface ou la hauteur de la clôture du lieu où l'animal est conservé. La DDTM applique le principe de précaution, expliquant qu'un chevreuil peut avoir des réactions imprévisibles. L'instance ne peut pas faire d'exception, mais assure avoir pris en compte cette situation particulière. « On leur a proposé de la confier à un parc (le marais aux Oiseaux à Dolus-d'Oléron, NDLR), où ils pourront lui rendre visite. »
Après la mobilisation en novembre de Sylvie Rodeau, maire de Mirambeau, et de Bernard Louis Joseph, conseiller général, Émilienne et Raymond ont dans un premier temps obtenu un délai supplémentaire et la possibilité de choisir un autre parc, plus près de leur domicile. Mais, pour eux, Bambi est chez elle à Mirambeau. « Si on me l'enlève, elle risque de se laisser mourir. Je suis la seule à pouvoir lui donner à manger. »
Sursis
Hier, Émilienne a abattu sa dernière carte en envoyant à la DDTM un dossier comprenant, entre autres, une pétition de 2 000 signatures et plusieurs certificats de vétérinaires assurant que l'animal est bien traité. L'association Luna de protection animale européenne a également écrit au vice-procureur de la République de Saintes pour lui demander d'intervenir. Elle peut y rajouter le témoignage de la femme de Michel Drucker, fondatrice de l'association de protection animal LI-ZA. « On a été bouleversé par cette histoire », confie Dany Saval, en proposant hier aux Espiot de recueillir Bambi. « Mais ils l'aiment tellement que, même à Michel Drucker, ils ne veulent pas la donner ! »
Les Espiot ont un sursis. La DDTM assure qu'elle ne viendra pas saisir l'animal le 1er janvier. Elle continuera à travailler avec Émilienne et Raymond pour trouver un terrain d'entente.